06 juillet 2018

American Nightmare 4 : Les origines - Gerard McMurray


Le premier volet de la franchise American Nightmare était une véritable purge mal agencée et mal exploitée. American Nightmare 2 explorait mieux le concept original sans impressionner, quand American Nightmare 3 : Election jouait habilement de l’idée de base pour instaurer un propos politique pertinent, malgré un scénario peu élaboré. Dans American Nightmare 4 : Les origines, James DeMonaco revient sur la première Purge, dans l'espoir de faire mieux. Verdict.

THE DEATH OF A NATION

American Nightmare 4 : Les origines (The First Purge en version originale) part d'un principe particulièrement passionnant et alléchant : comment la nuit cauchemardesque de crimes, de délits et de meurtres en tout genre, a été mise en place sur le territoire américain ? Ainsi, les premières minutes du long-métrage réalisé par Gerard McMurray - qui prend la relève d'un James DeMonaco uniquement scénariste ici - nous plongent quelques jours avant la première Purge, avant de se lancer dans le grand bain.

Dans un style proche du documentaire, s'enchaînent reportages télévisés, interviews des nouveaux Pères fondateurs et des experts sociaux, ou discours du Président des Etats-Unis, pour nous présenter le projet du gouvernement. Ainsi, avant de devenir un phénomène national, la Purge a été testée sur l'île de Staten Island, grandement défavorisée, pour analyser le comportement de la population américaine et la fiabilité du concept.




Evidemment, la présentation de cette première nuit infernale, où les citoyens cobayes qui acceptent de participer sont payés par la NFFA (parti des Nouveaux Pères Fondateurs de l'Amérique), était le moyen idéal de développer un propos politique piquant. American Nightmare 4 : Les origines tente ainsi de décrire les motivations politiques, la corruption ambiante et surtout de décortiquer la société américaine. Une nation cadenassée entre les extrêmistes conservateurs et les progressistes libertaires, entre nationalistes et mondialistes, entre racistes et cosmopolites...

Le précédent volet de la franchise mettait en avant une politicienne démocrate progressiste et un républicain fanatique (non sans rappeler Hillary Clinton et Ted Cruz à l'époque), s'affrontant à quelques mois des élections. La franchise, décidée à devenir un miroir de l'Amérique plus qu'une saga horrifique depuis Election, nous livre alors un quatrième film pastichant l'Amérique trumpienne.

Il dépeint un gouvernement qui surfe sur un populisme évident, s'octroie les faveurs des populations les plus démunies, en profite jusqu'à la moelle avant d'abandonner sur le bas-côté ces mêmes citoyens trompés.




MAKE AMERICA DIVIDED AGAIN

Sur le papier, American Nightmare 4 : Les origines avait donc des choses passionnantes à raconter et un sous-texte très riche à développer. Un postulat rapidement écarté, le film laissant tomber toutes portées sociales, politiques, économiques ou historiques au profit d'un faux-thriller dramatique sur fond de film d'action bourrin vide de sens.

Le long-métrage enchaîne alors les rencontres armées, les cache-cache faussement effrayants et les révélations passablement anodines. Pas avare en action, Gerard McMurray offre certes une ou deux scènes très bien exécutées (un combat en plan-séquence dans une cage d'escalier) et un final explosif largement inspiré de The Raid (la maestria en moins). Cependant, si la réalisation est plutôt bien tenue, aucune image ne marquera durablement la rétine.

Pire : le réalisateur n'arrivera jamais à créer une once de tension au milieu de ce ramassis de déflagration. Un désintérêt profond dû à une écriture des personnages au mieux ratée, au pire oubliée. Les protagonistes sont tous plus insignifiants les uns que les autres, quand ils ne sont pas tout simplement exaspérants (la voisine de la jeune héroïne) ou de simples ressorts scénaristiques à l'image de Skeletor, seul personnage un tant soit peu intrigant du film.




A côté de quelques visages connus comme Marisa Tomei (dont le rôle se révélera presque plus nul que celui de Channing Tatum dans Kingsman : Le Cercle d'or) et Melonie Diaz (qui apparaît 25 secondes), le film est porté par une troupe d'acteurs inconnus, menés par Lex Scott Davis et Y'lan Noel. Et en plus d'être desservis par l'écriture, leur casting dans le cadre d'un tel film socio-horrifique interroge.

En effet, loin de la diversité progressiste présentée par Blumhouse, le choix de comédiens afro-américains ressemble surtout à un opportunisme marketing à peine dissimulé, quelques mois après les succès retentissants de Get Out et Black Panther au box-office. Une décision qui rappelle finalement (et paradoxalement) les actions politiques du parti Républicain que veut dénoncer le film puisque ces héros répondent à des stéréotypes gênants sur la drogue, la violence ou l'humour et ne se sont jamais mis en valeur.

EN BREF

Les origines de la Purge avaient de quoi passionner et captiver à l'heure de l'Amérique de Trump. Malheureusement, le long-métrage délaisse rapidement son propos politique pour livrer un film d'action bourrin sans fond et particulièrement cliché.

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