Victime d’une campagne de dénigrement totalement disproportionnée, non-exempte de poussées haineuses et sexistes, le reboot de Ghostbusters fait figure de cas d’école en matière de détestation 2.0 et de promotion catastrophe. Pour autant, le film de Paul Feig est-il aussi mauvais que ses adversaires le laissent croire depuis des mois ?
S.O.S NECROPHILIE
Pour difficile que soit l’évaluation d’un film conçu comme un pur produit nostalgique, basé sur une œuvre culte (à défaut d’être géniale), ce S.O.S Fantômes ne prêtera pas le flanc aux tombereaux d’insultes déversés sur lui. Non, le film n’a rien d’un abominable nanar. Et non, ce n’est pas une renversante bonne surprise.
Contrairement à ses héroïnes, le métrage échoue à capturer l’ectoplasme qu’il traque. Du condensé de pop culture réalisé par Ivan Reitman, Paul Feig peine à retrouver l’essence et emballe un remake très pauvre, car obsédé par ses contours. Si on retrouve donc une structure similaire, des passages recopiés quasiment à l’identique et une série de caméos aberrants, pour ne pas dire plutôt révoltants (l’apparition de Bill Murray tient du doigt d’honneur gériatrique) et des tonnes de chimères numériques, le réalisateur échoue à comprendre la recette originale.
En essayant de transformer un pur film fantastique parsemé de gags en une comédie grasse émaillée de fantômes, Feig ne parvient qu’à livrer une relecture très superficielle, mécanique et incapable de se détacher de son modèle. Le film tombe donc dans un piège attendu, d’autant plus visible qu’il est esthétiquement victime d’une direction artistique cheap et d’effets visuels défaillants – on peine à croire que l’ensemble a coûté plus de 150 millions de dollars. Ce handicap énorme pèse logiquement sur l’appréciation du film, mais ne parvient toutefois pas à en masquer les nombreuses réussites.
L.O.L BUSTERS
Mais Paul Feig rappelle également qu’il est tout sauf un manchot, et que le cahier des charges imposé par la production ne suffit pas à étouffer son talent de chef d’orchestre humoristique. S.O.S Fantômes témoigne une nouvelle fois de son art consommé de la rupture de ton, où une vanne cinglante, une réplique à contretemps (l’apanage de la parfaite Kristen Wiig) suffit souvent à sauver une scène ramollie.
C’est aussi dans ses transitions que le film marque des points. Si sur le papier, l’enchaînement des séquences ne va pas toujours de soi, les articulations entre gags et dialogues dynamisent incroyablement le récit et offrent une série de rires salvateurs. En réalité, sitôt le quatuor de comédiennes lancé sur autre chose que le strict déroulé de l’intrigue, on a droit à un véritable festival de répliques, dont le sens du rythme fait mouche.
Enfin, le film vaudrait presque le déplacement par la seule grâce de Kate McKinnon et Chris Hemsworth. La première génère un décalage comique ahurissant, poussant systématiquement le bouchon trop loin, amenant son personnage aux limites du malaise et de l’absurde, avec une jubilation évidente. Le second pulvérise son image trop lisse avec un bonheur contagieux et un sens du ridicule qui frise l’hystérie. A deux, ils prouvent que ce S.O.S Fantômes en avait bien plus dans le ventre que la version que nous découvrons aujourd’hui, et nous laissent rêver ce qu’un Paul Feig et ses acteurs pourraient nous offrir en ayant véritablement les coudées franches.
EN BREF
S.O.S Fantômes est un film schizophrène, coincé entre un remake putrescent et une comédie hilarante.
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