25 mai 2017

Jurassic World - Colin Trevorrow



Plus de dix ans ont passé depuis le dernier épisode de Jurassic Park. Entre temps, la mode des reboots et autres remakes a pris des proportions délirantes, poussant logiquement Steven Spielberg et Universal à nourrir la nostalgie du public en redonnant vie à une saga encore très présente dans l'imaginaire collectif. Après une promotion clairement orientée autour de l'idée du fun et du second degré, nous étions donc particulièrement curieux de découvrir quelles surprises nous réservait ce Park.

Ceux dont le cœur bat toujours pour les dinosaures y trouveront à peu près leur compte, le film faisant tout pour les exposer continuellement et au grand jour, avec une relative générosité. Les spectateurs en quête d’un divertissement rondement mené pourront également se satisfaire du produit proposé par Universal. Son rythme est constant, l’ensemble ne souffre globalement pas de temps mort et on constate l'effort des scénaristes pour élaguer l'histoire et ne pas alourdir le film, notamment ses dialogues.


On redoutait que la mode du tout numérique ne joue contre la tradition d'excellence de la franchise dans le domaine des effets spéciaux. Il n'en est rien, les équipes d'ILM ont une nouvelle fois fait du très bon boulot. Hélas, ils n'ont manifestement retenu aucun enseignement de l'expérience acquise sur les précédents épisodes. Les animatroniques ont manifestement été quasiment éliminés de l'équation, tandis que l'animation semble ne plus se soucier de modèles physiques, comme Spielberg l'imposa par le passé. Résultat : une foultitude de bébètes numériques dénuées de réalité, sortes de chewing-gum rugissants incapables de procurer le moindre frisson. La conséquence est terrible, Jurassic World est le film aux effets les plus ratés de la saga. Et de loin.

Malheureusement, Jurassic World souffre de son indécision. Alors qu’il agite en permanence la nostalgie du premier épisode sous notre nez, le scénario de Colin Trevorrow semble ne pas du tout en comprendre l’esprit et échoue à créer une réelle dramaturgie ou un quelconque émerveillement. En témoigne la scène où retentit pour la première fois le thème principal de John Williams, utilisé ici non pas pour accompagner la découverte des formidables créatures qui peuplent le parc… mais pour nous dévoiler la déco de son hôtel de luxe.


Le long-métrage se pense et se vit comme une attraction, ni plus ni moins. Une orientation qui lui confère son dynamisme, mais limite son impact. Les personnages témoignent cruellement de cette orientation, à l’image de Chris Pratt, dénué de personnalité et de motivations, qui se contente de jouer les guides touristiques rigolards, annulant systématiquement tout effet de tension ou de suspense. Comment croire à une menace mortelle quand nous évoluons aux côtés d’un blagueur capable de contrôler les Raptors, l’espèce la plus dangereuse qui soit ?

Autre source de déception : le refus du film de nous offrir la dose de frissons indissociable de la saga Jurassic Park. Non content de piocher presque toutes ses victimes parmi des figurants anonymes, le film ne nous offre pas le cataclysme annoncé par ses bandes-annonces. On se demande ainsi quel était l'intérêt de situer l'action dans un parc rempli de touristes, pour finalement ne pas vraiment les confronter aux dinosaures affamés qui les entourent. Une timidité regrettable, car on se rappelle que la conclusion furieuse du Monde Perdu n'empêchait pas le film de demeurer un divertissement grand public.


À force de ne pas choisir de direction claire, Jurassic World n’assume pas non plus sa dimension Z. Certaines péripéties semblent pourtant offrir au spectateur une relecture inattendue de Mega Shark VS Giant Octopus et ses innombrables suites qui remplissent les étagères des cinéphiles déviants. Alors que le film se transforme en match de catch pour sauriens génétiquement modifiés, nous réalisons que cette voie nanardeuse mais jubilatoire était peut-être une issue pertinente pour un film qui n’a clairement pas les ambitions de son sujet.

Mais pour assumer une folie à la fois sauvage et bon enfant, il aurait fallu faire le choix de se couper d’une partie du public potentiel, la frange la plus cinéphile et nostalgique, plutôt que de tenter artificiellement de satisfaire toutes les audiences, quitte à n’en combler aucune.
résumé


EN BREF 

À ne pas choisir entre l'hommage respectueux et le gros délire, Jurassic World finit par se perdre et proposer une grosse attraction manquant singulièrement de caractère.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire